Paulo Coelho: un bonimenteur au festival de Cannes

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Par Jérôme Garcin

Nom de Dieu, je n’ai jamais lu un livre aussi bête. Aussi arrogant et pontifiant dans la bêtise. A côté, même la prose d’Eric-Emmanuel Schmitt et les poèmes de Francis Lalanne semblent digestes. Il est vrai que je n’espérais guère de miracle. Cela fait quinze ans que l’auteur de «l’Alchimiste» nous inflige ses prêches de jamboree, ses bluettes de cartomancien, ses romans de gourou véreux.  

Pourquoi, me direz-vous, perdre du temps à lire «la Solitude du vainqueur», de Paulo Coelho (Flammarion, 19 euros)? Parce qu’il se déroule au Festival de Cannes - où, afin de soigner sa promotion, notre homme a réservé, à partir d’aujourd’hui, une suite dans un palace. Je pensais que ce haut lieu du cinéma mondial aurait des vertus curatives sur le Raël des Relais H. C’était compter sans sa roublardise de bonimenteur évangéliste. Car de films, il n’est pas question, sauf pour s’entendre répéter qu’ils sont chiants et réservés à des critiques «adeptes de la masturbation mentale». Cannes n’est ici que la vitrine d’un monde en perdition. La morale y est bafouée. Les puissants écrasent les faibles. Les femmes se tuent au Botox et à la silicone. Pour désinfecter cette nouvelle Babylone, cette moderne Sodome, un industriel russe, que sa femme a largué, exécute une actrice, un producteur, un mannequin, un styliste…

Ecrit avec les pieds, traduit avec abnégation, truffé de bonnes paroles («Aimer est nécessaire parce que nous sommes aimés de Dieu»), ce polar d’assainissement dédié à Marie «conçue sans péché» accumule tous les clichés sur la célébrité, le glamour, et «la beauté intérieure» tellement plus grande, n’est-ce pas, que «la beauté extérieure». Le plus insupportable est d’entendre un milliardaire brésilien ayant vendu 100 millions d’exemplaires à des gogos dénoncer, sur la Croisette, le règne de l’argent, la riviera de diamants, les voitures de luxe et cette «Superclasse» qui manipule les esprits. Que diable fait-il d’autre?

J.G

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